Fénelon : une intolérance tolérante

Une conférence de Michel Dussart à la Société d’Emulation de Cambrai Novembre 2008

  

En préambule, il faut rappeler quelle est la situation du protestantisme au XVIIème siècle.

En 1598, Henri IV promulgue l’édit de Nantes autorisant la liberté de culte aux Protestants, cet ancien protestant met ainsi fin à 30 ans de guerre civile. Le mot tolérance ne figure pas dans l’adit – Quand à notre époque nous employons ce mot, cela signifie accepter la pensée de l’autre comme une autre alternative à notre propre manière de penser ; une attitude d’accueil à l’autre, un respect de l’autre. Cette attitude est impossible au XVIème siècle. Dans le domaine religieux, en particulier, chacun est sûr de détenir la vérité.

Il faut donc convertir puisqu’on est persuadé que l’autre est dans l’erreur et joue son destin éternel. Il serait donc criminel de l’abandonner et de renoncer à ce que nous appelons le droit d’ingérence pour le sauver y compris par la force

 

L’attitude de Fénelon face aux Protestants

 

La douceur – voilà le maître mot de la politique de Fénelon

En 1673, l’abbé Fénelon est nommé supérieur des « Nouvelles Catholiques » établissement parisien destiné à la conversion des femmes et des enfants protestants et ce contre la volonté des parents. Des violences y étaient parfois commises. Fénelon, plus directement chargé du spirituel a appris à bien connaître le protestantisme, Il a su discuter, écouter les Réformés pour les amener à la conversion. Que ce soit à Paris ou de sa nouvelles responsabilité de missionnaire, sur les cotes de Saintonge et d’Aunis, le supérieur des « Nouvelles Catholiques incarnait  aux yeux de sa famille de Colbert, en particulier de son fils le marquis de Seignelay la voie de la douceur.

Fénelon écrit en 1685 « les peuples commencent, ici, à nous aimer, ils disent que nous sommes des braves gens qui prêchent bien l’Ecriture ». L’intendant de Rochefort, de Seignelay écrit de son coté au Roi Louis XIV «  la douceur e la piété des missionnaires obtenaient les plus heureux effets. »

Fénelon l’avait bien dit à Louis XIV «  j’aime mieux périr par la main des frères errants que d’en avoir un seul exposé aux violences des gens de guerre.

Mais Louis XIV sait aussi utiliser la force, les dragonnades en particulier. En 1685, considérant que le Protestantisme est devenu quantité négligeable, il publie l’édit de Fontainebleau, révoquant l’édit de Nantes. Ceci eut des conséquences regrettables  pour notre économie.

Plus tard, Fénelon écrivit à Jacques II, prétendant à la couronne d’Angleterre, exilé en France «  La force ne peut jamais persuader les hommes, elle ne fait que des hypocrites ».

 

Fénelon voulait instruire, faire appel à l’intelligence, en évitant les sujets qui fâchent. Il alla même jusqu’à retrancher le latin, évitait l’épineuse question des indulgences et n’obligeait pas à la récitation de l’Ave Maria

 

Le réalisme de Fénelon.

 

"Il faut garder les lieux où ils peuvent s’enfuir. Il leur faut assister à la messe sous peine d’amende.

« Ces peuples ont un attachement incroyable à l’hérésie. Ils  sont entêtés – les lettres de Hollande leur donnent des espérances horribles » Il ajoute aussi «  Il faut les aider matériellement en espérant les garder dans le Royaume »

Fénelon peut même employer des moyens subtils voire douteux pour parvenir à ses fins. C’est ainsi qu’il fait imprimer en Hollande des pamphlets falsifiés dans lesquels les Réformés s’attaquent mutuellement ; Il demande l’exil de personnes dangereuses.

Mais «il ne faut pas que les avis de rigueur paraissent venir de nous car ce serait ruiner l’œuvre dont nous sommes chargés »